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RÊVES ÉVEILLÉS

Un autre regard sur le monde

Bolivie, terre de contrastes

 
       Cela fait maintenant deux bons mois que j'ai quitté la Bolivie. Et pourtant l'image de cette femme assise dans sa voiture avec son bébé, alors qu'une manifestation d'enseignants pour avoir droit à leur retraite passe ses à côtés, me hante. Avais-je le droit de prendre cette photo? N'ai-je pas volé un moment de sa vie? Prendre une photo comme celle-ci me pose un problème de conscience. Je n'avais jamais pris de cliché comme celui-ci, et pourtant je l'ai bien prise cette photo. Pourquoi? J'ai senti que ce qui se passait sous mes yeux avait une signification, permettait de comprendre un peu mieux la problématique qui régnait dans l'air bolivien à cette période. C'est pour cela que je la diffuse aujourd'hui. Chacun pourra se demander éternellement à quoi pensais cette femme à ce moment là, elle seule le savait...




        Août 2008. Dans moins d'une semaine ont lieu des élections cruciales pour le pays. Le président du pays, Evo MORALES, a cédé à la pression des préfets de régions de l'opposition et organise un "référendum révocatoire". Deux scrutins ont lieu. Le premier décidera du maintien ou non du Président à son poste, le second décidera du sort des préfets de région. C'est un vote de confiance renouvelée...........ou pas.


        Avec Eric nous sommes à Sucre et nous sentons bien que l'ambiance y est totalement différente de celle rencontrée sur l'altiplano. Ici s'affichent non seulement le drapeau bolivien pour les fêtes patriotiques qui se déroulent actuellement, mais également le drapeau de la province du Chuquisaca. Il ne s'agit pas d'une opposition entre indigènes de l'altiplano et colons blancs (cela est en revanche beaucoup plus vrai dans la province de Santa Cruz plus à l'Est). Car Sucre est une ville peuplée en majorité d'indigènes. Mais pourquoi les gens s'opposent-ils alors? Les habitants de Sucre ont l'impression que les habitants des hauts plateaux profitent d'eux. La politique du Président depuis qu'il est arrivé au pouvoir est axée prioritairement vers les campagnes pour palier au déficit d'équipements de base: eau, électricité, routes, éducation, santé. Pendant ce temps là le développement des villes est freiné car il n'y a pas assez de recettes pour financer à la fois le développement des campagnes et celui des villes... A l'image d'une Amérique latine où les avis n'hésitent pas à verser dans l'extrême, la Bolivie est aujourd'hui déchirée entre des gens qui n'avaient rien et auxquels on commencent juste à s'intéresser, et des gens qui aspirent à avoir plus que le minimum vital qu'ils ont déjà. Bien sûr les situations et les avis individuels ne se limitent pas à ces deux seuls "camps"! Cette femme sur la photo, les manifestants qui défilent, chacun possède son propre avis et sa propre analyse. Surfent sur la vague les 5% de la population qui possèdent 80 % des richesses... Ceux-là je ne les croise jamais!

     
        Chacun voit midi à sa porte, mais les corporatismes restent puissants. Hier ce sont deux mineurs qui ont été tués par l'armée lors de manifestations anti-gouvernementales. comment se passeront les élections dimanche prochain? En quittant le pays et en arrivant au Brésil, nous n'espérons qu'une chose avec Eric, c'est que les tensions s'apaisent et que la solidarité entre Boliviens se crée.... J'était ici il y a cinq ans. Aujourd'hui le pays est véritablement en chantier. Les poteaux électriques sont dressés à la hâte, les routes s'asphaltent, il n'y a plus autant d'enfants qui travaillent dans la rue. Ces investissements se font en grande partie grâce à l'argent qui provient de la nationalisation des ressources naturelles (gaz, réserves minières...) jusqu'ici détenues par des investisseurs étrangers. La Bolivie grandit et s'affirme, il y a des crises comme dans toute évolution mais il y a aussi beaucoup d'espoir pour que les gens retrouvent un sourire qui leur va beaucoup mieux que l'angoisse profonde de l'avenir qui règne actuellement...


       Cette femme en parlerait sûrement bien mieux que moi et bien plus longtemps. Mais dans son regard se sentent déjà beaucoup d'émotions qui traversent la Bolivie et ses habitants jour après jour...
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M
*sourire*tu décris sans doute très bien l'agitation à la fois inquiète et excitée de tout changement majeur ... en tout cas, c'est ainsi que je me sens quand je finis la lecture de cet article : inquiète et excitée, curieuse, le coeur ouvert ... et un peu serrécurieux, non ?bisou
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